vendredi 12 décembre 2014

Rebondir avec succès


À 56 ans Philippe Rambaud se lance dans le bénévolat. « Donner permet de recevoir énormément » explique-t-il. Son association, 60 000 rebonds, vient en aide aux entrepreneurs qui ont connu la faillite. Lui-même l’a connue lorsqu’à 49 ans il décide de quitter Danone après 25 ans de bons et loyaux services. Il monte sa boîte afin de travailler comme il le souhaite, dit-il, mais connaîtra l’échec et apprendra à rebondir. Rebondir avec succès, c’est l’intitulé de la dernière conférence organisée par le Réseau Excellence à l’IAE d’Aix en Provence.





C’est sur le ton de la confidence mais aussi, et surtout, du conseil que six entrepreneurs ont participé à cette conférence. Tous n’ont pas connu la faillite. Pascale Fildier et François Mazon ont même connu des carrières exemplaires. Pourtant la première, banquière, doit faire face à la fermeture de la filiale dont elle est dirigeante. Elle décide de fonder sa start-up, rendezvouscheznous.com, un site dans le domaine de l’e-tourisme. Un secteur bien éloigné du milieu bancaire, témoignant d’un virage à 180 degrés.

         La décision de François Mazon est tout aussi spectaculaire. Alors qu’il est directeur général de Cap Gemini France, il ne trouve plus la motivation pour continuer.  À 50 ans il décide de retourner sur les bancs de la faculté de droit d’Aix pour devenir avocat pénaliste. Persévérance et motivation retrouvées lui permettront d’intégrer le cabinet Molla-Bass, et d’aller à la barre sans avoir encore obtenu son diplôme. Savoir rebondir c’est savoir réinventer sa vie, même à 50 ans.

         Plus jeune, Hervé Trouillet appartient à ceux qui refusent d’accepter l’impossible. Réalisateur de série d’animation, autodidacte, sans diplôme ni expérience outre celle qu’il s’est forgée, Hervé a combattu les regards pessimistes des investisseurs. Pourtant malgré l’expérience de ces derniers, il n’a pas échoué.

         Cette notion d’échec est un sujet tabou, elle rappelle la peur. C’est cette peur qu’il faut combattre. « Il faut aller toucher sa peur, se retrouver et ne penser qu’à soi, arrêter de suivre les chiffres » déclare Aude Le Bas. Aujourd’hui, son entreprise, Vitalibio, connaît des difficultés après plusieurs années de croissance. Il faut savoir réagir et vite. Car ce monde est imprévisible, fait de sinusoïdes, de réussites et d’échecs.


         Ces échecs deviennent de plus en plus brutaux et pourraient continuer à s’intensifier. Surtout, on ne nous a pas appris à les combattre.  Avec des appuis de taille, Jacques Attali, Alain Juppé, Philippe Rambaud a donc lancé 60 000 rebonds. Cette association empêche les entrepreneurs de rester dans l’échec. Connaître une faillite est un traumatisme d’une violence extrême. Vie personnelle, professionnelle et financière se retrouvent bouleversées. Face à cette situation Philippe Rambaud explique qu’il ne faut pas se renfermer. Il faut aller chercher l’accompagnement, souvent en faisant appel à un professionnel pour se reconstruire psychologiquement. Ce sont les personnes compétentes qui permettront de travailler sur son échec, et de retrouver sa force.

         Nombre d’entrepreneurs retrouvent d’ailleurs une énergie considérable quand ils sont bien accompagnés. Cela leur permet de lancer des projets encore plus ambitieux. C’est le cas d’Arthur Boivin. Après avoir vu sa première entreprise faire faillite, il retourne à la vie de salarié. Le temps de construire un capital, faire mûrir sa nouvelle idée, et de se lancer de nouveau dans le bain de l’entreprenariat. L’échec n’est plus vu comme une faiblesse mais alors comme une opportunité de progresser et de rebondir.

mercredi 3 décembre 2014

Qu'est ce que le succès ?

Entrepreneur depuis son adolescence, consultant expert en leadership, Terry Tillman n’a plus rien à prouver sur sa connaissance de l’entreprise et du développement des Start-Ups. Retour sur une conférence à laquelle StartAix a eu le plaisir de participer au domaine de La Féraude.

Qu’est ce que le succès ? Est-il possible de l’évaluer ? Comment puis je savoir si j’ai du succès ? Le succès. C’est le maitre mot de Terry Tillman pour introduire sa conférence abordant les clés de la réussite des Start-Ups. Cher à tous les entrepreneurs, le succès est une valeur solidement ancrée dans notre société. Il se déterminerait justement à ce que l’on possède. Est-ce une juste vision ? Plus aux yeux de Terry. Le succès ne doit plus se mesurer au nombre d’euros qu’affiche notre bulletin de salaire, ni au part de marché que notre entreprise est en train de conquérir ou bien le profit que nous réalisons. Ces objectifs sur lesquels nous nous concentrons sans cesse nous donnent une mauvaise approche du monde des affaires. Un monde où la notion de personne est renvoyée au second plan. Un monde où l’homme n’est plus au cœur de la relation, il est ignoré, renvoyé dans les cordes alors qu’il est l’essence même de tout projet.


Pourtant cette philosophie a une conséquence directe sur les résultats d’une entreprise, il a été prouvé que des employés heureux sont des employés productifs. Les sociétés à succès, Google et Apple en tête, sont des sociétés où les employés sont heureux de travailler. Ce sont des sociétés capables d’innover au quotidien. Et cela grâce à leur politique. Parce que l’innovation ne se fait pas seule, ces compagnies encouragent leurs salariés à développer des projets, et donc à échouer. Elles ont su mettre en place un apprentissage par l’expérience. Et toutes les expériences ne s’avèrent pas toujours être une réussite. Si la norme a appris à vouloir éviter à tout prix l’échec, les plus grands esprits ont su le considérer comme un élément de la vie quotidienne. Un événement à l’occurrence forte certes mais plus un événement menaçant. L’échec nous apprend plus que le succès. Maitriser l’échec c’est ne plus répéter ses erreurs, mais aussi apprendre à se découvrir et à se dépasser et donc prendre des risques.

Se dépasser. Quitter sa zone de confort. Pour se connaître, pour grandir il faut savoir surmonter ses limites. Nous créons nos propres limites, qu’elles soient physiques ou morales. Nous inventons des excuses, retardons des échéances. Combien d’entrepreneurs hésitent à donner ce coup de téléphone vers un client jugé inaccessible ? Combien ont remis au lendemain une tâche difficile ? Pourtant rien ne nous empêche d’essayer à part notre raison et les limites que nous lui imposons. Être entrepreneur c’est aussi oublier d’être raisonnable, savoir sortir de cette zone de confort, sauter ces barrières qui nous empêchent d’avoir ce que l’on veut vraiment, de savoir qui l’on est. Il faut prendre le risque, peu importe ce dont il s’agit, prendre le risque c’est déjà faire un pas en avant. C’est ce que font les leaders avec du succès.


Ils savent ce qu’ils veulent, ils savent comment l’obtenir. Nous désirons tous la même chose, les mêmes symboles (une belle voiture, une grande maison, voyager, de l’argent). Mais ces symboles ne s’acquièrent pas sans l’expérience. Et la véritable recette du succès est peut être là. Acquérir l’expérience, échouer, découvrir ses limites, les dépasser, obtenir ce que l’on désire, découvrir qui l’on est et tout mettre en place afin d’acquérir des symboles.

Ce travail sur soi est sans doute le plus difficile mais est une étape indispensable pour réussir tant dans sa vie professionnelle que personnelle. Se connaître soi-même permettra de connaîtra son but. Une fois ce but fixé, il faudra dépasser ses limites, connaître l’échec et en apprendre les erreurs. Cependant une question reste dans l’atteinte du succès. Ai-je le courage ? Ce courage de sortir de cette routine qui nous amènera tôt ou tard à nous demander un jour si la vie n’a que ça à nous offrir, et à regarder derrière soi avec regrets.

Flavien Meneghello 




samedi 27 septembre 2014

Leçon d'anticipation

Conséquence de la mise en place du Fair Play Financier, une tendance s’est dégagée du mercato 2014 : le prêt. Seules les écuries habituelles ont pu se permettre leurs folies annuelles, Real et Barça en tête. Même la puissance financière qu’est Manchester United a du recourir au prêt pour permettre l’arrivée de Falcao.


Toujours actif sur le mercato, Chelsea ne déroge pas à la règle. Cependant au lieu d’amener des joueurs en prêt, les Blues leur proposent de faire le chemin inverse. C’est ce qu’a récemment analysé le magazine Four Four Two. La mise en place de ce système permet déjà aux Pensioners de déjouer le Fair Play Financier en toute légalité.

Certes Chelsea a dépensé plus d’argent qu’il n’en a récupéré (106,70 millions dépensés pour 96,61 millions de récoltés soit un delta de 10,09M€). Les ventes cumulées de David Luiz (49,50M€) et de Lukaku (35,36M€) ont notamment permis au club Londonien de s’offrir Diego Costa, Cesc Fabrégas et Loïc Rémy (81M€ à eux trois). Cependant le club d’Abramovitch est dorénavant enclin à réduire ses pertes et maximiser ses profits. Pourtant l’équipe de Mourinho reste toujours aussi compétitive. Son effectif semble encore renforcé comparer à celui de la saison passée. Ce mercato 2014, nous renseigne donc plus qu’il n’y parait sur la stratégie économique du Chelsea FC.

Comme l’indique l’article de Four Four Two, Chelsea joue sur deux domaines d’activités stratégiques. Le premier étant celui de Mourinho qui est de gagner des titres à l’aide d’un effectif le plus compétitif possible. Plus méconnu, le second consiste à avoir un rôle sur le marché avec l’achat et la revente de jeunes. La stratégie est simple, le club fait signer des pépites, les prête immédiatement pour faire grimper leur valeur puis les revend. Ces deux activités ne se croisent que rarement, comme lors du dernier mercato avec les cas belges. D’abord Lukaku qui a porté la tunique des Blues et qui aurait pu rester si Diego Costa n’avait pas été acheté. Puis Thibault Courtois finalement revenu après plusieurs saisons à Madrid. La stratégie de Chelsea se distingue donc d’un club comme Porto qui recrute dans l’ambition de gagner des titres mais aussi de s’assurer des plus-values en vendant des piliers de son effectif.


Acheter des jeunes joueurs, les prêter et les revendre aux prix forts, Lukaku en est le meilleur exemple et le tableau des départs du club va dans le sens de cette démarche. Déjà à l’origine de l’inflation des prix de vente des joueurs, l’oligarque Russe a inventé le « trading footballistique ».

Un partenaire se dégage de cette stratégie : le Vitesse Arnhem, actuel avant dernier du championnat Hollandais. Parmi les 10 arrivées au club cet été 2 joueurs arrivent en prêt de Chelsea (McEachran et Wallace), parmi les 11 départs 3 sont des retours de prêt vers Chelsea (van Aanholt, Lucas Piazon, Christian Atsu). Sur la saison 2013/2014 le constat est encore plus flagrant : sur 8 arrivées 5 proviennent des Blues.  Peu d’entre eux ont eu a chance de connaître Stamford Bridge, pourtant ils sont des joueurs déterminants dans la stratégie du club.


Ainsi, depuis la saison 2010/2011, 12 joueurs ont été prêtés au Vitesse Arnhem. Seul Delac a vu sa valeur baissée au terme du prêt. On peut également constater que les joueurs âgés de plus de 24 ans ont tous été vendus. Une erreur notable reste : Nemajan Matic. Au terme de son prêt en Hollande le serbe sera vendu à Benfica pour 5 millions d’euros (Chelsea fait alors une plus value de 3,25M€) avant de le racheter pour 25 millions d’euros en janvier 2014.

Cette saison le club londonien prête 20 joueurs (Torres est volontairement exclus de la liste). Le tableau qui suit permet de connaître les 20 élus, leur âge et leur valeur actuelle.
                          

On constate donc que Chelsea est actuellement en train de faire fructifier 82 millions d’euros. Certes des joueurs  de cette (Victor Moses, Piazon, Van Ginkel et Marko Marin) ont coûté une certaine somme au club l’empêchant de toujours réaliser des plus value. Néanmoins l’analyse précédemment faite avec les joueurs prêtés au Vitesse Arnhem montre qu’il est rare qu’un joueur perde de la valeur. Ces 20 joueurs peuvent être comparés à un portefeuille d’actions. Lorsque le club estimera que la valeur maximale du joueur sera atteinte, nul doute qu’il sera vendu. D’autant plus que Chelsea y gagne à deux reprises. Effectivement les termes du Fair Play Financier indiquent que les investissements faits dans les jeunes joueurs ne comptent pas dans les dépenses d’un club. Abramovitch se joue donc depuis longtemps d’un système tout juste mis en place et dont les limites semblent déjà dépassées.


Sources : 

http://www.fourfourtwo.com/features/how-chelsea-are-gaming-system-better-anyone-and-why-theyll-keep-winning
Données chiffrées : http://www.transfermarkt.com/ 

samedi 26 juillet 2014

Le projet Continassa : l'espoir italien

La Juventus Stadium a récemment fêté ses deux ans, pour l’occasion la Squadra Azzura y a d’ailleurs mis les pieds pour la première fois et s’est assurée le billet en direction du Brésil. Aussi, la Juventus s’est offert un beau cadeau dans la lignée du projet du stade : le quartier Continassa au nord de la ville turinoise.



Aujourd’hui l’Italie continue de connaître une crise politique profonde. Les menaces de Berlusconi depuis ses condamnations semblent faire vaciller le gouvernement d’Enrico Letta. Cette paralysie est le résultat d’une culture Italienne convaincue que la politique ne peut être juste ou bien saine dans la Péninsule. (Lire : L'homme qui tient l'Italie en otage, Tim Parks) Le calcio et de manière générale le sport italien en sortent évidemment durement affectés. Il suffit de voir les stades aujourd’hui en Italie. La plupart sont vétustes et inadaptés aux normes avec un taux de remplissage faible (en moyenne 53,4% la saison passée). On atteint d’ailleurs le sommet de cette comédie avec le nouveau stade de Cagliari qui menaçait de s’effondrer. Et la situation de l’Italie face à la crise n’a rien fait pour arranger les choses. Tranchant dans les dépenses, instaurant la rigueur, Mario Monti avait lui-même exprimé l’impossibilité au Comité Olympique Italien de se présenter candidat pour accueillir prochainement les Jeux. Dans ce contexte particulièrement étouffant, la Juventus de Turin fait figure d’OVNI. Mais pas seulement. La vieille Dame doit aussi devenir la source d’espoir et d’inspiration pour une nation en panne de confiance.

Pour cela elle y a mis du cœur et de l’argent. Beaucoup d’argent. En effet, 350 millions d’euros seront investis dans le projet Continassa. Cependant, cet article n’inspire pas à revenir en précision sur les dépenses Turinoise. Il se veut témoin des perspectives positives qui peuvent être observées dans le monde du « foot business » loin des écarts que l’on peut constater dans cet environnement (salaires ou montants des transferts). Ainsi l’espoir d’en voir ressortir des projets utiles pour tous n’est pas vain.

Concrètement, cette zone est à l’abandon total depuis des années. Redynamiser ce quartier est l’un des objectifs dévoilés par le club. D’ailleurs c’est là où se trouve le Juventus Stadium. La zone se verra également occupée par le siège du club, le nouveau centre d’entrainement de l’équipe première à partir de la saison 2015/16, un hôtel, un cinéma, un centre commercial, un centre de bien être, des résidences privées, parcs et parking. La Juventus étend donc son domaine d’activité stratégique au-delà de l’événementiel  pour augmenter les services et l’expérience du tifosi. La construction de l’hôtel permettra au club d’accueillir ses supporters dans une enceinte proche du stade mais aussi proche du centre de la ville. Faut-il rappeler que la Juventus est le club le plus populaire en Italie mais pas dans Turin ? Ce qui explique la logique de posséder son propre hôtel à deux pas du stade. Les cyniques n’hésiteront pas à sortir les banals arguments comme quoi tout cela n’est que pur business et que la Juventus fait cela pour accroitre ses profits. La beauté du football, sport populaire, en ressortirait encore salie. Répondons une fois de plus qu’aujourd’hui ce sport populaire est une véritable industrie qui doit se pérenniser et donc accroitre ses profits !

Et puis, par cette période de récession, de rigueur, de surendettement, peut-on vraiment blâmer une société qui veut investir dans un pays en plein doute ? Parce que ces investissements vont pouvoir créer de l’emploi bien qu’à un faible nombre.
Surtout, ce projet est un symbole de détermination et l’aboutissement d’une politique de reconstruction débutée par Jean Claude Blanc suite au scandale Calciopoli. La Juventus a toujours su se montrer forte pour construire le Juventus Stadium. Elle a fait face aux difficultés politiques et à la lenteur de l’administration italienne pour aboutir à l’un des plus beaux projets du football actuel. Cette détermination à combattre cette politique qui freine l’Italie est sans doute le meilleur motif d’espoir dont la population, les entrepreneurs et autres artisans doivent s’inspirer. Les clubs aussi doivent voir en cette politique comme une source d’inspiration. Car le Juventus Stadium est un véritable succès. En conséquence on observe que des clubs tels que la Roma, rachetée par l’américain James Pallotta, commence à envisager le lancement de leurs propres stades. La construction du stade de l’Inter Milan était aussi une clause imposée par Moratti lors de la toute récente vente du club à l’indonésien Thorir.

Le projet Continassa  pourrait être perçu comme « un acte de courage contre le déclin et un geste de confiance envers l’avenir ». C’est ce qu’a déclaré Sergio Marchionne, le même jour de l’officialisation du projet de la Juventus, lors de la présentation de l’investissement de 1 milliard d’euros à Turin pour relancer Maserati, filière luxe de Fiat, le partenaire historique de la Vieille Dame. 

Cet article a d'abord été publié sur So Foot.
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dimanche 1 décembre 2013

Marseille : un projet. Quel projet ?


Au lendemain de la défaite contre Arsenal, les mots concernant l’OM ont pu être durs. Certains n’hésitant pas à déclarer que les choix de Baup sont une insulte à la Ligue des champions. A tort ou à raison, ces déclarations ont le mérite de soulever le problème des clubs français et l’Europe. Pourtant à Marseille on continue de parler d’un projet.


En août dernier le président de l’OM, Vincent Labrune, évoquait la stratégie et les ambitions du club pour la saison à venir. Il espérait ainsi voir l’OM atteindre les huitièmes de finale de la ligue des champions sans oublier que le tirage au sort pourrait compliquer cet objectif. Pourtant, le président affirmait vouloir « chercher à gagner le plus de matches possibles, à faire honneur à nos couleurs, à emmagasiner de l’expérience pour, d’ici deux ou trois ans, être la belle surprise de la compétition. Un peu comme Dortmund  ».Cette simple déclaration peut soulever plusieurs interrogations sur le management marseillais. Le 11 de départ aligné par Elie Baup contre Arsenal fait-il honneur aux couleurs du club ? Qui a réellement emmagasiné de l’expérience ? Sur ce 11 de départ la moyenne d’âge était donc de 25 ans. On comptait aussi trois recrues du mercato comme titulaires : Khlifa, Imbula et Lemina. Ces deux derniers ont d’ailleurs été remplacés en cours du match où une troisième recrue, Thauvin, est entrée en jeu.

Des dépenses injustifiées 

Cet été Marseille a donc dépensé 42 millions d’euros pour 6 joueurs dont la moyenne d’âge est de 21,5 ans. En excluant Payet et Khalifa, la moyenne d’âge passe à 19,25 ans pour un montant de 31,5 millions d’euros. Environ 75% du budget alloué aux transferts a été consacré à des joueurs très jeunes, n’ayant encore rien prouvé en ligue 1 et encore moins au plus haut niveau. Si, effectivement, Thauvin sortait d’une bonne première saison en ligue 1 avec 10 buts et 3 passes décisives cela ne justifie pas pour autant un investissement de 15 millions d’euros. Imbula et Mendy avait joué la quasi-totalité de leurs saisons respectives  en deuxième division et ont couté à eux deux 11,5 millions d’euros ! Enfin les dix apparences de Mario Lemina sous le maillot de Lorient ont convaincu la direction Marseillaise de débourser 5 millions d’euros … D’ailleurs, si l’on s’intéresse aux valeurs de ces jeunes joueurs en juin 2013 on remarque immédiatement que le club a payé des sommes beaucoup trop élevées : Thauvin avait une valeur de 6 millions d’euros, Imbula était évalué à 3 millions d’euros, Mendy à 2 millions,et Lemina à 1 million d’euro.

S’il est habituel de payer un joueur au-dessus de sa valeur marchande, surtout s’il est jeune, cela reste dans les mesures du raisonnable. Depuis janvier 2012,  président Labrune parle pourtant d’économie, avec notamment une réduction d’environ 15% de la masse salariale (passée de 85 millions à 65 millions d’euros). Néanmoins, on ne peut pas dire que les dépenses soient réellement effectuées de manières judicieuses. Non pas qu’investir sur l’avenir soit une mauvaise idée, bien au contraire, mais il faut savoir investir de manière intelligente comme le font de très grands clubs européens et notamment les clubs allemands, aujourd’hui à la mode.


La hype allemande

Déjà évoqué dans un article, l’Allemagne du football fait aujourd’hui figure d’exemple à suivre, et les Marseillais ne dérogent pas à la règle. Et puisque Dortmund est cité par Vincent Labrune comme le modèle sur lequel Marseille s’inspire, faisons une comparaison avec les investissements du club de Rhénanie du nord trois ans avant leur conquête du titre en 2011, et leur finale de ligue des champions en 2013.

Evolutions des dépenses du Borussia Dortmund 3 ans avant leur titre de champion et âge moyen des joueurs achetés

2007/2008
2008/2009
2009/2010
2010/2011
Total
Dépenses (en millions d'euros)
10,7
13,7
10,9
6,4
41,7
Age moyen
27,1
23,5
22,4
21,6
23,65

Le constat est simple : l’OM a dépensé en un été ce que Dortmund a dépensé en 4. Pourtant cela n’a pas empêché ces derniers d’accumuler les bons résultats. Certes, à l’heure actuelle, le modèle économique des grands clubs allemands est l’exemple à suivre. Ceci étant il ne fait pas tout. Si le Borussia a réussi à obtenir ces performances c’est aussi grâce à des investissements intelligents avec notamment des mises sur des jeunes joueurs.  Contrairement aux mouvements du club phocéen cet été le Borussia s’est offert ces joueurs sans pour autant payer le prix fort. Aussi le club de la Ruhr n’a pas axé son recrutement uniquement sur des jeunes sans expérience. Il a aussi su attirer des joueurs en fin de contrat (Piszczek, Großkreutz). Enfin, le Borussia présente d’autres atouts dans sa gestion des joueurs. D’abord son centre de formation est de qualité, citons notamment Schmelzer et Gotze qui arrivaient de l’équipe -19.  A cela le club sait combiner l’intégration rapide des jeunes recrues. Ces qualités en management ont amené beaucoup de potentiels à rapidement devenir des hauts potentiels puis des cadres de l’équipe. Cette qualité a géré l’évolution de ces joueurs est l’un des facteurs clés de la réussite du club allemand.


Parce qu’il faut reconnaître que le Borussia a su détecter et recruter plusieurs diamants bruts (Kagawa, Sahin, Lewandowski, Blaszczykowski). Il est à leur honneur d’avoir su les tailler pour atteindre les résultats que l’on connait. Parmi ces jeunes joueurs beaucoup ont fait partis de cette équipe capable de tenir tête au Bayern deux saisons consécutives et de se hisser en finale de la  ligue des champions. Justement, pour pousser le vice encore plus loin dans la comparaison avec le club phocéen,  regardons combien d’euros ont été dépensés pour les cadres de l’équipe menant le Borussia en finale cette année :

Sommes dépensées
(en millions d’euros)
Année
Valeur estimée (en millions d’euros)
Weidenfeller
0
2002/2003

Lewandowski
4,7
2010/2011
4,5
Hummels
4,2
2009/2010
4,5
Bender
1,5
2009/2010
1,2
Subotic
4,5
2008/2009
2,5
Piszcek
0
2008/2009
2,5
Schmelzer
formé au club
2010/2011
3,5
Gundogan
5,5
2011/2012
6,5
Reus
17
2012/2013
20
Blaszczykowski
3
2007/2008
3,7
Grosskreutz
0
2009/2010
1,2
Gotze
formé au club
2010/2011
1,5
Total
41,9
51,6

41,9 millions d’euros, soit une nouvelle fois la somme dépensée par le club marseillais cet été. Surtout, la somme dépensée est inférieure  de 20% à la somme des valeurs des joueurs au moment de leur transfert dans la Ruhr. Rien de bien rassurant concernant l’efficacité des recruteurs marseillais, ni la capacité du club à évaluer et négocier le prix du transfert. Mais pour ne pas accabler totalement le club et les supporters il faut rappeler que le projet de Dortmund s’est inscrit sur une stratégie réellement débutée en 2008 avec l’arrivée de Jurgen Klopp sur le banc. 

Il lui a fallu deux ans pour construire une équipe capable de rivaliser avec le Bayern, qui en 2010 était focalisé sur la Champions League, et cinq années pour atteindre la finale de cette dernière. Labrune lui parle d’une stratégie de 2 à 3 ans. Peut-être qu’une analyse similaire a déjà été faite dans les bureaux de la Commanderie. Mais les conclusions ne semblent pas avoir été les mêmes. D’abord parce que  l’OM a dépensé 42 millions d’euros cet été soit 10 de moins que le vice-champion d’Europe. Des dépenses pour des joueurs décevants (Imbula, Mendy). Cela éveille quelques craintes puisque le projet Marseillais est de redevenir compétitif d’ici 3 ans justement grâce à ces jeunes. Dans la stratégie du club ces derniers devraient avoir atteint, à l’horizon 2016, une certaine maturité et un niveau capable de rivaliser avec les mastodontes parisien et monégasque.

Ces 42 millions investis font également figure de rupture avec la gouvernance menée par Vincent Labrune depuis sa nomination à la tête du club. En effet depuis 2011, l’ancien président du conseil de surveillance du club, s’assurait de réduire au maximum les dépenses (11 millions d’euros investis en 2011 et 8,4 millions en 2012). Cette rupture dans la stratégie de réduction des coûts commencée il y a deux ans est une belle image du projet Marseillais. 
Un projet encore flou.